La mesure de la viscosité de la poix optique

Situation

Je travaille usuellement dans une pièce à 22°C autour de 50%HR. Un thermomètre glissé entre les carrés de poix en fin de travail indique autour de 27°C. J’ai pris beaucoup de précautions pour ne pas bouillir ma poix en fabriquant l’outil. Je polis avec 4 volumes d’eau distillé pour 1 d’oxyde de Zr et je parabolise à 10 pour 1. Mes carrés en parabolisation font 7 mm d’épaisseur.

J’ai obtenu un état de surface d’aspect très peu lisse sur mon 250 F/5 voici deux ans. Avec le même outil (donc très vieux) j’ai du mal à retourner à la sphère sur un 200 F/6 et l’aspect n’est pas plus beau. J’ai l’impression que ma poix se déforme trop lentement lors du travail. J’ai l’impression que l’outil se déplace plus régulièrement sur le miroir après un pressage à 30°C, comme s’il fallait la ramollir.

Enfin je ne comprends rien au test de l’ongle dans la poix pour contrôler sa dureté / viscosité.

Objectif

Savoir si ma poix est trop dure et ensuite la refondre avec de l’essence de térébenthine ou bien en changer.

Méthode

L’annexe J du Texereau (édition en anglais) montre l’appareil proposé par Twyman pour mesurer la viscosité de la poix. Il est composé d’une pointe de 14° d’angle épointé à plat sur un diamètre de 1 mm. La pointe est chargé par une masse de 1 kg (J’ajoute qu’il faut se placer dans le champs de pesanteur terrestre normal…). On mesure la profondeur de pénétration en 5 minutes.

 

L’appareil de Twyman ressemble au pénétromètre (voir ce mot sur la toile) utilisé pour mesurer la résistance à l’enfoncement des cires et produits bitumineux.

 

L’article propose une plage d’acceptabilité de la poix sur la base de la profondeur de pénétration. Les bornes sont de 0,5 et 6,1 mm pour des températures entre 20 et 28°C. L’optimum proposé étant une poix de pénétration 1,8 mm à 24°C (qui donnera 0,7 mm à 22°C et 4 mm à 24°C).

 

La poix ainsi caractérisée est supposée convenir pour les miroirs entre F/6 et F/12. Il est entendu qu’il faut une poix plus molle pour un miroir plus ouvert et que l’épaisseur des carrés a aussi son importance.

Mon appareillage de mesure de viscosité

La pointe est faite dans un rond d’aluminium de 6 mm. J’estime que sont angle est de 13,4 ° et que le plat de la pointe est entre 1,0 et 1,04 mm. La masse de l’ensemble pointe plus poids est de 1,01 kg.

 

Ce qui, je l’espère, est suffisamment peu différent de la spécification.

 

Je mesure la position de la tige avec un pied à coulisse, puis je place le poids pour 5 minutes. Je retire le poids et je remesure la position de la tige.

 

Pour mesurer la vitesse de pénétration, j’ai fixé le pied à coulisse de manière à pouvoir relever le déplacement d’une bague solidaire de la tige. Le frottement du pied à coulisse m’a semblé assez faible pour ne pas perturber la mesure. J’ai ainsi fait des relevés toutes les 30 secondes.

Premiers résultats

Mes carrés de poix sont si minces et si mous que la pointe pénètre jusqu’au fond en moins de 5 minutes. Je ne peux faire la mesure que sur deux carrés collés ensembles par pressage ou dans le fond de la casserole sur un restant de poix épais. La pénétration varie de 13 à 18 mm en 5 minutes à 22°C. C’est beaucoup et c’est une surprise!

 

J’en profite pour faire une mesure de vitesse de pénétration. Le phénomène est quasi logarithmique. La moitié de la pénétration est acquise dans la première minute, le reste dans les quatre suivantes.

 

Je refond la poix et fait un bloc témoin de 18 mm d’arête. La pénétration est à nouveau totale en moins de 5 minutes.

J’ai bien vérifié l’appareillage et la procédure: Je ne trouve pas de faille. Il faut donc admettre que la poix est trop molle et la faire durcir fortement. Les questions qui restent sont: Un test comparatif avec d’autres poix pourrait-il montrer que la poix n’est pas trop molle et qu’il y a un problème d’appareillage? Quel est le faquin qui m’a vendu une poix si molle ?

Objectif révisé

Retrouver par bouillage la bonne dureté. Vérifier qu’il n’y a pas une grossière erreur en approvisionnant une poix de référence chez un fournisseur de confiance.

Mesure de la poix bouillie

Après 30 minutes d’ébullition (bulles de 1 à 12 mm et bonne odeur de pin) puis refroidissement de 24h, la pénétration est tombée à 13 mm pour 21°C. C’est mieux mais encore loin de la plage du Texereau.

 

J’ajoute 30 minutes de bouillon. Cette fois-ci les vapeurs sont agressives pour la gorge. Il ne faudrait pas devoir recommencer. Après 24 heures de refroidissement la pénétration est de 10 mm à 21°C. C’est mieux mais pas encore dans la plage…

J’approvisionne un kilogramme de Gugolz 55 chez Astrotélescope (un fournisseur que je recommande chaudement). Ce sera ma référence. La poix est beaucoup plus dure à l’ongle comparativement à l’autre, même bouillie. Une première mesure donne 5,3 mm pour 21°C. C’est proche des mesures faites par Eric J. Shrader (http:// www.atmsite.org /contrib/Shrader/Acculap/acculap.html)

C’est dans la plage du Texereau, même si c’est dans la partie molle.


Pour être constructif : mon pénétromètre marche et je conseille à chacun de s’en fabriquer un.


Enfin j’aide l’humanité souffrante et faible en affirmant que : la poix molle est totalement impropre aux usages des amateurs débutants, et la preuve est encore faite que ce fieffé fournisseur abuse ses clients!

Je dois recommencer tous mes miroirs pour supprimer le mamelonnage. Je suis confiant qu’avec cette nouvelle poix cela fonctionnera comme dans les livres.

Voici mes mesures mises en graphique. Éloquent, n’est-il pas?

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