T400-C les principes

Le constat

Le STROCK 250 est vraiment un instrument épatant. Sa compacité et ses performances en font un instrument que l’on a toujours avec soi. Cet engin m’accompagne tout le temps lors de mes virées en week-end, en vacances, en France ou à l’étranger. Il permet des observations remarquables. De part la qualité optique de son miroir primaire et la facilité des opérations de collimation, il offre des visions planétaires vraiment exceptionnelles, surpassant bien des instruments prestigieux. L’instrument n’ est pas en reste pour les objets du ciel profond grâce à son diamètre de 250 mm intéressant, son rapport F/D de 5 judicieux et surtout, la possibilité de l’emporter et l’utiliser sous des ciels d’exception. Mon plus beau souvenir à ce jour avec cet instrument est une virée à Chinguetti, en plein désert mauritanien. Mais, mais, mais…

 

Mais, voilà, ce n’est jamais qu’un 250…
Par deux fois, nous avons organisé avec le club un séjour astro au Sahara. A ces occasions, nous avons emporté nos 250, mais aussi le T400 du club. Bien que son miroir primaire soit de piètre qualité, il offre vraiment des images du ciel profond d’une autre teneur que nos 250. L’image est certes plus empatée mais la quantité de lumière collectée fait la différence. Elle permet des visions colorées des nébuleuses, d’atteindre de plus grandes magnitudes limites, de voir des extensions et des détails plus ténus, de grossir fortement sur de petits objets. Bien évidemment, cet engin se distingue par son diamètre important, mais aussi sa robustesse et son aisance d’emploi. En contrepartie, il pèche par son manque d’optimisation des volumes et des masses. L’engin pèse plus de 56 kg et une fois démonté, les colis qui le composent sont assez volumineux.

Fort de ces constats, l’idée de posséder un instrument plus puissant que le T250 mais tout aussi pratique s’impose. Je veux un « traqueur » de ciel profond, capable d’être utilisé sous les plus beaux ciels que j’espère avoir la chance d’observer.

Le Strock 250.

Les critères de départ

La puissance du télescope est directement dictée par son diamètre. Tel est le préambule et l’évidence à graver ici dans le marbre.


A cette vérité, j’ajoute d’autres considérations plus personnelles que je compte prendre en compte pour ce projet.

  1. Dès le départ, j’envisage de polir moi-même le miroir. L’expérience acquise lors du 250, les nombreuses rencontres avec d’autres amateurs, me permettent d’envisager cette opération sans trop d’inquiétudes.
  2. Je veux un engin personnel que je juge ultime – pour le moment. L’optique doit être de belle qualité, évidemment performante en ciel profond, mais aussi, me permettre des grossissements d’ogre quand les circonstances s’y prêteront.
  3. Cet engin doit être aisément transportable, léger et compact. Il me suivra durant mes congés, lors de virées avec mon camping-car, mais aussi lors de lointains voyages sous des ciels d’exception. Le transport aérien détermine alors un poids minimal, un volume raisonnable, une solidité à toute épreuve.
  4. Par ailleurs, je veux tester et expérimenter d’autres pistes. C’est pourquoi, je ne ferai pas un STROCK à plus grande échelle, bien que cette option soit pertinente. Je me contenterai de lui prendre quelques beaux principes et concepts astucieux. Par contre, l’esprit et l’expérience acquise sur la conception du 250 seront toujours bien omniprésents. Mais pour ce futur télescope, je veux autre chose d’encore plus minimaliste, plus épuré. Enfin, j’aimerai utiliser et mettre en œuvre des matériaux composites, gage de légèreté et de solidité, pour le plaisir de manipuler, d’expérimenter et d’être un peu original. C’est décidé, ce sera un télescope «ultra-léger» et «ultra-compact» (UL-UC).

Les sources d'inspiration

A ce jour, voici les constructions amateurs qui m’inspirent le plus pour ce projet :

L’incontournable Mel Bartels, surtout pour sa monture dobson trilatérale pliable, concept qui utilise 3 patins de frottement sur 3 tourillons d’altitude.
traduction du site de Mel Bartels

L’incroyable dobson binoculaire de 56 cm de Bruce Sayre avec sa structure ultra-légère, très épurée, des concepts assez osés (collimation par inclinaison de la structure triangulée, miroir collé sur son barillet) site de Bruce Sayre
Mais surtout, le 60 cm de Greg Babcok, qui à mes yeux est la conception la plus parfaite en UC. traduction du site de Greg Babcock

Tous ces télescopes ont comme points communs une structure triangulée à 6 tubes, un anneau unique pour cage de secondaire et une monture sur le principe du «flex-rocker».
Le T800 de Vincent Leguern est l’instrument amateur le plus puisant qui m’ait été donné d’essayer lors des Rencontres Astronomiques de Printemps. C’est une machine remarquablement bien conçue. On voit que Vincent est un vrai « mécanicien », rien n’est laissé au hasard. Les solutions retenues sont vraiment réfléchies, abouties, optimales.
Les performances du T600 de Raphaël Guinamard et celui de Rolph Arcan représentent pour moi le type d’instrument idéal, celui que j’aimerai avoir. Ce sera peut-être mon prochain objectif, un jour…..Depuis, j’ai eu le privilège d’observer dans bien d’autres instruments puissants, dont le remarquable T1000 de David Vernet.

La forme

Sur ce dessin en CAO, il reste à représenter les attaches de la structure triangulée en partie basse, ainsi que le contreventement des 2 tourillons.

Voici les plans exécutés avec un logiciel de CAO.
La forme générale est très proche du télescope de Greg Babcok, mâtinée de concepts bien «Strockiens» comme une cage polygonale, l’araignée à 3 branches en T, le support du miroir secondaire, la collimation du miroir primaire par devant et un concept de rangement bien plus compact par empilement des divers éléments après démontage des tourillons d’altitude. L’idée séduisante du trilatéral de Mel Bartels a été écarté pour des raisons d’encombrement. En effet, ce concept oblige un flex-rocker de plus grande taille

Le colisage

Après bien des réflexions, j’ai choisi les options suivantes :

Le miroir

L’engin étant destiné aux voyages aériens, il convient d’avoir un lot de matériel fragile qui s’accommode des restrictions en poids et tailles des bagages cabine. Le miroir primaire pesant 10,3 kg, il est à lui seul ce premier lot. Il est rangé dans une valise de transport aux dimensions idoines.

Le télescope

J’ai été tenté par la réalisation d’une caisse de miroir primaire, intégrant le barillet, les attaches des tubes de la structure triangulée et celles des tourillons d’altitude. Elle aurait été conçue pour faire usage de valise de transport, le miroir aurait été collé sur son barillet et resterait toujours à demeure, tout en supprimant le système de maintien latéral. Mais l’encombrement de cet ensemble était préjudiciable à la notion de «bagage cabine avion».
Le rangement des divers éléments du télescope, base annulaire, 2 tourillons d’altitude, flex-rocker, barillet et cage du secondaire, se fera par empilage dans une valise de 57 x 57 x 20 cm.

Les tubes

Les tubes de la structure triangulée sont coupés en deux et sont transportés à part soit dans un étui de 150cm une fois assemblés, soit en vrac et désacouplés dans les bagages de voyage pour les besoins du transport aérien.

Les choix optiques

Le miroir primaire

Le diamètre

Des critères énoncés ci-dessus, le diamètre de 400 offre le meilleur compromis du moment et s’impose pour moi. Avec cette dimension, nous sommes – paraît-il – à la limite supérieure de la méthode classique de taille, de polissage et de parabolisation des miroirs énoncée par Texereau.
Avec un diamètre plus important, le poids du miroir et des outils deviennent excessifs et rendent leur manipulation délicate, le travail plus problématique. Par ailleurs, le télescope devient plus lourd et sur un autre aspect, plus cher. La parabolisation ne peut se faire qu’avec plusieurs polissoirs de tailles réduites. Enfin et surtout, les défauts d’astigmatisme sont la problématique à résoudre pour tout tailleur d’optique de plus gros diamètres.

La focale

La focale doit permettre une utilisation sans escabeau ou marche pied. Elle sera donc de 1800 mm, soit un F/D de 4,5. Je me fixe cette limite inférieure sachant que la parabolisation sera plus délicate à réaliser, mais j’assumerai en son temps ce choix. Un F/D plus court aurait accru le confort d’observation mais me faisait prendre plus de risques.

 

Ce sera donc un télescope de 400 mm à F/D 4,5 de type Dobson Newton ultra-léger et ultra-compact.

La cage du secondaire

Pour optimiser les principaux éléments de la cage du secondaire d’un télescope, une fois les caractéristiques du miroir primaire déterminées, il est impératif de considérer l’oculaire le plus contraignant, et ce qu’on compte faire avec. Puis, il faut dès à présent choisir sa gamme d’oculaires et les accessoires qu’on compte y adjoindre, barlow, tête binoculaire, etc…

L'oculaire déterminant

l’oculaire le plus contraignant est celui qui offre le plus grand champ observable.
Personnellement, je suis un inconditionnel des oculaires à grand champ de vision, mais pas un fana des grand champs stellaires à des grossissement très faibles. Je préfère toujours grossir un minimum, tant pour une meilleure visibilité des détails, que pour avoir un fond de ciel le plus noir possible et ne pas éteindre les objets de magnitudes limites. Cela peut aussi se traduire par une préférence pour les pupilles de sortie maximales de l’ordre de 5 mm.
Voici mes hypothèses de départ :
– par exemple, j’adore comme oculaire le Panoptic de 27 mm pour son remarquable piqué d’étoiles sur la totalité du champ. Il offre une pupille de 6 mm et un champ apparent de 1°. On peut lui préférer pour le même champ observé, le Nagler 22 mm qui est un bien bel objet. Il offre alors un grossissement un peu plus important, mais avec une pupille de 5 mm. Ces deux oculaires sont de vrais 2’’.
– le Panoptic de 24 mm peut être une belle alternative, plus rationnel pour l’engin que je projète avec sa lentille d’entrée en 1’1/4 et sa pupille de 5,3 mm.
– aujourd’hui, j’ai choisi la gamme Ethos 6, 8, 13mm. Le 21 serait idéal avec son champ de 1° et sa pupille de 4mm, parfait, mais sont poids de 1kg est trop contraignant pour ce télescope. Au final, je dispose du Nagler 22m idéal pour les voyages légers et du Nagler 26mm si je n’ai pas de contraintes.

Le diamètre intérieur de la cage secondaire

Il s’agit ici de déterminer l’écart entre l’axe optique du télescope et la position du porte oculaire. Cette opération est déterminante et n’est pas à prendre à la légère..
Cela consiste d’une part à situer la position du plan focal sur la cage du secondaire et par ailleurs de placer précisément le porte oculaire, en prenant en compte ses contraintes d’encombrement une fois rentré au maximum. Enfin, il faut noter la position des foyers de la panoplie complète des oculaires que l’on compte utiliser et en déduire les cotes mini/maxi qui en découlent. Cette information est primordiale pour déterminer le débattement minimal du porte oculaire. Pour information, l’Ethos 21 demande la position la plus rentrée du PO alors que les Ethos 6 ou 8 les feront sortir au maximum. Attention si l’on utilise un Paracorr qui oblige à sortir davantage. A cette chaîne de cotes, il convient d’ajouter éventuellement la place d’un passe filtre et une petite latitude de quelques millimètres pour anticiper une myopie à venir.

Nous avons réuni les données, champ maxi, écart du foyer du porte oculaire et focale de l’instrument, qui permettent de déterminer les dimensions du profil de la cage du secondaire et la position exacte du porte oculaire.
Une fois le cercle de pleine lumière fixé (cf ci-dessous), nous pouvons obtenir la hauteur du porte oculaire par rapport au miroir primaire et donc, à l’intersection des 2 axes optique, la position du miroir secondaire.

J’ai déterminé tous ces paramètres à l’aide d’un logiciel de CAO, en traçant les épures des axes optiques, du champ maxi et des divers éléments.
J’ai choisi un porte oculaire Crayford MoonLite, avec démultiplication. Bien que d’un certain poids, 420 g, c’est un très bel objet de précision. Hélas, il supportera mal les conditions râpeuses des déserts.

Le miroir secondaire

L'obstruction réduite

Je suis convaincu des bienfaits qu’offrent les faibles obstructions, telles que nous avons pu le constater sur nos 250. Elles contribuent à de belles observations planétaires, détaillées parce que plus contrastées. En contrepartie, elles sont pénalisantes sur la taille du cercle de pleine lumière, d.

Deux solutions sont envisageables :
– Un secondaire de 79 mm (schéma ci-contre) génère 19,5% d’obstruction. Le cercle de pleine lumière est de 8,8 mm. L’illumination chute respectivement à 89 % et 73 % pour des diamètres correspondant aux coulants des oculaires 1’1/4 et 2’’. Ce choix semble une contrainte car le cercle de pleine lumière se trouve par conséquent réduit. Mais tout ceci n’est qu’approche théorique et la réalité est tout autre en observation visuelle, car cela ne se traduit que par un faible vignettage de quelques dixièmes de magnitude sur le champ maximum de l’oculaire de plus grande focale. Si on ne fait pas d’études photométriques comme du suivi d’étoiles variables, ces valeurs ne sont pas vraiment restrictives.
– si on fait grand cas d’avoir 100% d’illumination pour les oculaires au coulant 1’1/4 et être un peu plus à l’aise, il faut choisir un secondaire de 89 mm. L’illumination est de 80% pour un diamètre de 2’’ et l’obstruction est de 22,3%, ce qui est tout à fait correct.

– les illuminations et les cercles de pleine lumière sont calculés en fonction de l’écart entre l’axe optique et le plan focal situé dans le porte oculaire, déterminé dans les précédents chapitres.

Pour ce télescope, je fixe cet écart à 310 mm et j’utilise un miroir secondaire de 79 mm.

La structure

Je compte faire une structure triangulée à 6 tiges, solution élégante et minimaliste. Elle aurait pu être en tube de fibre de carbone de 12 mm de diamètre et d’environ 1,50 mètre de long. La raideur de ce matériau est tout à fait à même de supporter la cage du secondaire.
Ce diamètre est choisi de façon tout à fait empirique, sur la base de nos STROCK 250. Malgré leurs frêles apparences, ceux-ci présentent une rigidité étonnante. Leur structure est constituée de 8 tubes de 6 mm de 1 mètre de long. La section de chacune de ces tiges offre une inertie de 51 mm4, donnée essentielle à tout calcul de résistance des matériaux.
La nouvelle structure étant composée de 6 tubes, les forces à prendre en compte en première approximation ne sont affectées que d’un coefficient multiplicateur de 8/6 soit 1,33. Dans la réalité, le nombre de tiges soumises à la compression varie de 6 (position verticale) à 4, puis 2 (position horizontale) selon l’inclinaison du télescope.
Sur ces tiges, l’effort le plus pénalisant est celui générant le flambement des tiges soumises à la compression. Cette force de flambement est proportionnelle au carré de la longueur soit un rapport de 1,52 = 2,25, considérant le cas le plus défavorable de liaisons articulées.
Ces deux coefficients se réduisent à 1,33 x 2,25 = 3.
En employant des tubes de 12 mm de diamètre extérieur, j’obtiens des inerties de 10 x supérieures aux tubes de 6mm et cela avec l’hypothèse d’une épaisseur de 1 mm.

On le voit, par ce rapide raisonnement, ma structure sera, toute proportion gardée, plus rigide que nos STROCK 250.
Ces élucubrations sont confirmées par la manipulation de tubes de carbone de divers diamètres. Cela me permet de bien appréhender la rigidité en fonction des dimensions. A cette occasion, je remarque la raideur vraiment remarquable offerte par un diamètre de 14 mm.
Les tubes en carbone pultrudé sont constitués d’une structure de fibres tissées. Cette caractéristique fait que le module de Young (chiffre qui définit la raideur d’un matériau) est doublé.

La structure est composée de 6 tubes de carbone pultrudé de 14 x 11,5 mm.

J’avais envisagé dans un premier temps d’incliner plus ou moins cette structure pour la collimation du miroir primaire. Dans ce cas, toutes les tiges seraient venues s’accrocher par un système de réglage situé obligatoirement au niveau du barillet du miroir primaire.
Mais pour minimiser la longueur de flambement des tiges soumises à la compression, je vais fixer 4 barres directement en partie haute des tourillons. De plus, cette disposition augmentera les angles de la triangulation ce qui contribuera à augmenter d’avantage la rigidité de la structure. Il apparaît à l’usage que cette configuration offre un espace plus généreux pour la manipulation du miroir primaire lors du montage ou du rangement.
Pour des raisons pratiques d’encombrement, de poids mais surtout de rapidité de mise en oeuvre, je retiens le principe des tiges en « botte ». Les 6 tiges sont assemblées les unes aux autres par des chapes articulées sur des équerres. Une fois démonté, l’ensemble forme un fagot, une botte.
Enfin, les tubes sont coupés en deux et réunis par manchonnage, configuration indispensable pour prendre l’avion.

La cage du secondaire

La forme

Il importe que la structure triangulée n’empiète pas sur le trajet lumineux du télescope. Pour ce faire, les points d’attache doivent se situer aux 3 sommets d’un hexagone qui inscrit le diamètre utile, soit le miroir primaire en partie basse et le diaphragme de la cage du secondaire en partie haute.
Cette cage est composée d’un seul anneau, disposé en position basse par rapport au porte oculaire et l’araignée support du miroir secondaire. Ceci pour minimiser encore une fois la longueur de flambement des tiges de la structure triangulée et réduire le poids de cet élément au maximum. De plus, cette disposition permet de déposer la cage à plat lors du démontage ou du rangement.
Si, pour des raisons pratiques de fabrication, j’écarte une cage de forme circulaire, ce concept dicte la forme hexagonale de cette dernière. Elle est dimensionnée pour offrir au télescope un champ de 1,4°, soit celui offert par un oculaire Nagler 31 mm.

J’avais envisagé dans un premier temps l’emploi de cornières en L, telle la réalisation de l’américain Bruce Sayre. Mais cette section n’offre pas des caractéristiques optimales en matière de rigidité à la torsion. En fin de compte, je lui préfère une section rectangulaire.
Dans un premier temps, je fabrique un prototype. C’est un anneau hexagonal en aluminium avec des profilés rectangulaires de 10 x 20 mm, assemblés par des goussets rivetés et collés à l’époxy. Cette structure d’apparence très fine offre cependant une rigidité remarquable. Elle pèse 450g, ce qui est très satisfaisant. C’est une solution économique, simple et rapide et à mettre en œuvre que je peux conseiller à tous.
Mais, je veux expérimenter la mise en œuvre de composites à base de fibre de carbone. Cet élément s’y prête tout à fait et les gains de poids à ce niveau sont loin d’être négligeables sur l’équilibrage final de l’instrument.
La cage du secondaire héxagonale est réalisée en carbone/epoxy/balsa.

L’araignée

C’est une copie conforme à celle utilisée sur le STROCK 250, soit une araignée à 3 branches en T désaxée.
«Cette configuration originale permet de passer derrière le miroir et non devant, pour une compacité en hauteur évidente. Elle limite considérablement le porte-à-faux du miroir par rapport au système de fixation. De plus, elle est désaxée par rapport à l’axe optique du système. Cela permet de placer l’une des 3 vis de collimation du secondaire sur cet axe optique.
Dans un newton, le secondaire doit être excentré de l’axe optique pour conserver le cône de pleine lumière. C’est ce qui est appelé le  » shifting  » du secondaire. Un calcul ou une épure à l’échelle permet de dimensionner précisément ce décalage. Le shifting est ici pris en compte dans les plans».

Cette configuration s’avère à l’usage parfaite.
La modification majeure consiste en une forme pyramidale de l’assemblage des branches, reliant directement l’anneau hexagonal au support du miroir secondaire.
Pour des raisons de poids, elle est entièrement réalisée en carbone. Tout les assemblages sont collés afin d’éradiquer la visserie, source de surpoids non négligeable.

Le support du miroir

« Le miroir est collé au silicone sur sa plaque support selon un protocole bien précis.
Cette plaque en sandwich carbone/balsa/carbone est équipée de 2 cornières sur lesquelles sont fixées 3 touches de contact où viennent s’appuyer les 3 vis de réglage. La collimation de l’ensemble respecte le principe isostatique du point-trait-plan représenté par ces 3 touches.
Le point est dans l’axe optique du télescope (qui rappelons le, n’est pas celui du secondaire). Il est le pivot du système. Il est matérialisé par la vis de collimation centrale dont l’extrémité est limée en pointe. Celle-ci vient se positionner dans une cuvette conique, réalisée dans une des touches en laiton. Ainsi, le miroir peut bouger et pivoter en tous sens tout en conservant son centrage et sa hauteur par rapport à ce point, donc au porte oculaire. Cette vis permet le réglage en hauteur du secondaire par rapport à l’axe du porte oculaire. Ce réglage est réalisé une bonne fois pour toute.
Le trait doit bloquer en rotation la plaque support du secondaire tout en participant et permettant son orientation. Pour ce faire, sa direction doit passer par le point pivot. Il est impératif de faire au préalable une collimation soignée du secondaire avec le porte oculaire pour repérer et marquer avec précision la position de la pointe de la vis par laquelle le trait passera. Il est réalisé avec une petite lime ou une petite fraise conique de modélisme dans une des touches.
Le plan bloque par simple butée l’ultime degré de liberté qui reste à ce système. Ici, l’extrémité de la vis est arrondie pour permettre un bon glissement sur la dernière touche.
Un ressort plaque fermement le support sur ces 3 vis.
Il est important que cet ensemble ne présente aucun jeu. C’est pourquoi, une fois le réglage de hauteur du secondaire parfaitement réalisé (réglage définitif), il convient de bloquer la vis centrale par un point de colle ou autre. Pour diminuer le jeu des 2 autres vis, dont le réglage est à refaire à chaque montage du télescope, il faut utiliser des trous taraudés de longueur maximale. Des douilles en laiton taraudées M4 x15 sont idoines.
Pour une manipulation aisée, l’emploi de vis laiton M4 à large tête moletée est idéal (BHV paris). De grâce, pour ces réglages, point de vis Chc ou autres qui nécessitent l’emploi d’un outil ! »

Isolation du miroir secondaire

Le miroir secondaire des télescopes à structure ouverte est généralement sensible à la formation de buée sur la surface réfléchissante. Pour remédier à cela, il est de coutume de chauffer légèrement le dos du miroir avec quelques résistances électriques.
Dans un premier temps, j’avais envisagé cette option. L’ami Gilles a réalisé un prototype fort intéressant. Grâce à 2 sondes, on compare la température du miroir à celle de l’air ambiant. Le circuit fournit un courant pulsé dont la puissance est proportionnelle à l’écart mesuré. Ce montage consomme très peu d’énergie et s’accommode d’une alimentation de 5 à 20 V.

Mais, les cogitations poussées de l’ami Didier amènent à pencher vers d’autres solutions, plus simples à mettre en œuvre. Le constat est le suivant : la condensation se forme sur une surface qui en se refroidissant, atteint son point de rosée. A moins d’être dans le brouillard (air à 100% d’humidité relative), la température de l’air ambiant est toujours supérieure à celle du point de rosée. Il faut et il suffit que ce miroir reste à la température ambiante. Or, ce miroir perd ses calories par rayonnement sur le fond de ciel dont la température est grosso modo inférieure de 20°C à celle de l’air ambiant.
La solution consiste donc à isoler le rayonnement sur la face arrière du miroir. Le plus simple serait de polir le dos du miroir et de faire aluminer les 2 faces. La mise en place d’un écran isolant entre le ciel et le miroir est réalisée avec simple couverture de survie. Enfin, si l’isolation n’est pas parfaite et que le problème de buée n’est pas totalement résolu, il suffit de chauffer légèrement cet écran plutôt que le miroir, la dépense énergétique est alors bien moindre !!!

Le porte oculaire

Le choix

Pour ce télescope, un porte oculaire (PO) de 50 mm de coulant s’impose. Dans la logique de cette construction qui se veut ultra-légère, le KINOPTIC avec son poids plume est le choix le plus judicieux. Mais en fin de compte, le MOONLITE CR2, avec sa mise au point démultipliée, me fait craquer par sa qualité de fonctionnement et sa finition. Avec ses 590 grammes, ce bel accessoire sera la partie la plus lourde de la cage du secondaire. Equipé d’un bel oculaire, type Nagler 22mm, l’ensemble PO + oculaire accusera un poids de 1,270 kg…
Nota : à l’usage, ce PO vieillit mal et j’aurais dû lui préférer un Feather Touch.

La position

Sur les premières esquisses du télescope, j’avais positionné le PO à 0° par rapport à l’axe de rotation en altitude. Par ce fait, il se trouvait au milieu d’un des 6 tronçons de la cage hexagonale. De plus, il devait être fixé sur une console pour l’éloigner de 2 cm de cette barre.
Dans la solution finale, il est fixé au niveau d’un coin de la cage, à l’aplomb d’un des 3 points de fixation sur la structure triangulée. Cela permet de réduire considérablement le porte-à-faux de l’ensemble PO+oculaire et de reprendre les efforts de manière optimale. Par ailleurs, le PO est orienté à 30° par rapport à l’axe de rotation en altitude, ce qui offre un petit confort supplémentaire pour les observations basses sur l’horizon, position à ne pas négliger.

Le barillet

Les points de contacts

Bien qu’extrêmement séduisant, l’usage de leviers astatiques est écarté pour des questions de poids.
Dans ces conditions, un barillet à 18 points flottants s’impose pour supporter correctement ce miroir de 4 cm d’épaisseur. Je retiens la solution classique des 6 triangles montés sur 3 leviers. Mais Pierre me propose une option originale calculée avec le logiciel PLOP. Elle consiste a ne pas supporter uniformément le dos du miroir. En effet, les 6 points centraux ne reprennent que 72% du chargement initial. Cela se traduit par une déformation PTV de la surface utile du miroir de 2,7 nm. Le rêve !
Les proportions de rayons sont les suivantes : R1 = 34,5% pour 6 points de contact internes, R2 = 62,4% pour l’articulation des triangles et R3 = 75% pour les 12 points de contact externes.
Toujours dans un souci de poids et d’efficacité, le support latéral du miroir se fera par un câble. Une solution faisant appel à 4 points d’appuis repris par 2 palonniers me séduisait. Mais avec le concept retenu du flex-rocker et d’une structure minimaliste, je n’avais pas l’emplacement nécessaire pour permettre la fixation de ces accessoires.

Valeurs en nanomètres. On remarque un creux central, mais celui-ci sera masqué par le miroir secondaire

La collimation

Je vais reprendre le génialissime concept mis en œuvre sur nos STROCK 250 :
«Tous les barillets de télescopes se collimatent par 3 vis accessibles à l’arrière. Pour procéder à ce fin réglage, cela implique soit d’avoir un compère complaisant qui exécutera les manœuvres que vous lui dicterez, l’œil rivé à l’oculaire, soit de faire d’incessants va-et-vient entre l’oculaire et l’arrière de l’instrument, soit d’être doté par la nature généreuse de bras de gibbon, soit se faire greffer des bras de gibbon. Toutes ces solutions ne sont pas satisfaisantes à l’usage et l’on comprend mieux pourquoi beaucoup négligent la collimation, pourtant essentielle aux bonnes observations. Ici, le problème est élégamment résolu :
– les vis arrières vous donnent de l’urticaire ? et bien, placez-les devant… Un levier transmettra le débattement des vis sous le miroir, avec un effet démultiplicateur améliorant la précision du réglage.
– ces vis de réglage vous rappellent que la terre est basse ? Rallongez les commandes par des tiges suffisamment longues
– de plus, pourquoi agir systématiquement sur les 3 vis à la fois quand 2 suffisent ? Ce principe élémentaire permet de conserver une hauteur constante du miroir primaire quels que soient les réglages effectués.
Ainsi, la collimation n’est plus la corvée que l’on sait. »

La collimation se fera « par devant » grâce à 2 vis de réglage, agissant sur 2 leviers. Le 3ème point sera fixe.

Un barillet en aluminium

Le barillet est réalisé principalement en aluminium. C’est l’élément principal du télescope, sur lequel tous les autres viennent s’accrocher. La rigidité doit être maximale, aucune déformation préjudiciable n’est tolérable ici. De plus, il me faut un peu de poids supplémentaire en partie basse pour équilibrer la présence du massif porte oculaire Moonlite.

Le barillet est constitué d’un simple cadre assemblé par des goussets rivetés et collés, selon le même principe constructif que le prototype de la cage du secondaire (voir plus haut). Ce concept me plaît beaucoup. Il est simple et rapide à mettre en oeuvre pour un résultat optimal d’une solidité à toute épreuve. Les 2 leviers dessinent un triangle dans ce cadre, sont articulés sur la traverse basse et ont leur système de réglage sur l’autre. Les tourillons d’altitude viendront se fixer sur les 2 montants par le biais d’inserts filetés et de vis à serrage manuel.

Les tourillons

Calcul du centre de gravité

Ces deux tourillons sont essentiels au bon fonctionnement du télescope. Leurs dimensions et leurs positions conditionnent l’équilibrage final de l’ensemble. C’est pourquoi il est essentiel de calculer le plus finement possible le centre de gravité (CG) de l’instrument. Tout au long de la conception, cela implique qu’on doit estimer le poids et la position des divers éléments. Au fur et à mesure de l’avancement des travaux, ces données théoriques se matérialisent et se concrétisent, permettant de positionner exactement le CG.
Par ailleurs, il faut prendre en considération la variation de la position du CG, selon que l’instrument est équipé ou non de son système optique le plus lourd (oculaire + barlow), CG max et CG min. Nous en déduisons un CG moyen qui devra être le centre de rotation du télescope et plus précisément, le centre géométrique des tourillons.
Enfin, plus l’écart entre le CG min et le CG max est grand, plus le coefficient de frottement entre les tourillons et les patins devra être important. On pourra jouer sur le choix des matériaux en contact, leurs surfaces et éventuellement, d’accroître artificiellement le poids de l’ensemble par ajout de ressorts.
Pour ce télescope, je constate avec plaisir que mon CG est à 190 mm de la surface réfléchissante du miroir primaire, ce qui est remarquable et découle du choix de la construction légère. De plus, la variation de la position du CG est de +/- 23 mm, ce qui est gérable sans avoir recours à l’usage de ressorts.

La forme

Je compte accrocher 4 des 6 tubes de la structure triangulée à mi-hauteur des tourillons. La sagesse aurait voulu de les fixer sur le barillet, là où les flexions de l’instrument sont les moindres. Mais je veux relever ce petit défi, juste pour avoir une petite gueule qui me plaît. De plus, je veux une forme très épurée, très fine, juste un arc de cercle, sans traverse sur la corde de l’arc, ce qui pourtant permettrait d’accroître considérablement la rigidité.
On remarque que si les tourillons fléchissent et se déforment, ils perturbent d’autant la collimation de l’instrument. Leur rigidité doit être maximale. Mais en contrepartie, le fait de diminuer la longueur des tubes de la structure triangulée et d’accroitre leurs angles d’implantation augmente davantage la rigidité de cette partie.
Le choix de fabrication en sandwich carbone/balsa s’impose.
Le rayon de 306 mm est calculé au plus juste pour permettre le bon fonctionnement du mouvement d’altitude. Ce seront les 2 éléments les plus encombrants du télescope et ils conditionneront la dimension de la valise de transport.

Le flex-rocker et la base annulaire

Le principe

Avec le système classique employé ici et adopté par la quasi-totalité des Dobson, le mouvement de hauteur se fait en supportant les 2 tourillons par 4 patins. On respecte ainsi les règles de l’isostatisme qui démontrent qu’un cylindre – les 2 tourillons – peut être parfaitement maintenu par 2 vés générant chacun 2 points de contact – les 4 patins. Un guidage latéral est nécessaire pour bloquer le 5ème degré de liberté. Ainsi, il ne reste que la rotation libre autour de l’axe du cylindre. C’est le rocker.
Pour le mouvement d’azimut, il est de coutume de transmettre les charges du télescope par l’intermédiaire de 3 patins frottant sur un plan horizontal, la base, et ce, toujours pour respecter les sacro-saintes règles de l’isostatisme – un plan porté par 3 points, un axe supprimant 2 degrés de liberté, reste une rotation. Ces cales sont fixées sous le rocker et disposées à 120 ° par rapport à l’axe de rotation vertical. Pour garantir une bonne stabilité de l’instrument, le rocker et la base sur laquelle il frotte doivent être d’une grande rigidité. On obtient facilement un bon résultat en ne négligeant pas le choix, l’épaisseur et l’assemblage des matériaux employés ici.
Dans le cas d’un flex-rocker, nous allons fonctionner avec un système hyperstatique. Pour ce faire, nous allons jouer sur la flexibilité, la déformation des matériaux. Nous allons reprendre les efforts venant des 4 patins de frottement sur les tourillons pour les transmettre le plus directement possible à la base par l’intermédiaire de 4 autres patins – et non de 3. Cela ne peut bien fonctionner que si les 4 patins touchent de la même façon la base. Cela est impossible si le rocker est rigide car ce concept sera toujours bancal, les règles de l’isostatisme n’étant pas respectées. Mais cela devient possible si au contraire, on lui confère une certaine souplesse, une certaine flexibilité : c’est le flex-rocker !
Seule la base au contact avec le sol se doit de conserver une parfaite rigidité.

La forme

Le flex-rocker est donc réduit à sa plus simple expression. 4 petites cales prismatiques supportent les patins de frottement des tourillons. Elles sont solidarisées et collées sur un anneau très fin et flexible. Sous chacune de ces cales est fixé un patin de frottement en téflon glissant sur la surface plane de la base annulaire.
On remarque que la compacité en hauteur de ces cales demande des tourillons de grande taille.
Le guidage en rotation est assuré par 4 autres petits patins disposés dans les 4 coins du flex-rocker et frottant sur la tranche de la base annulaire.
La base est rendue annulaire en évidant son centre pour un gain de poids significatif. La rigidité est assurée par une épaisseur conséquente et l’emploi de matériaux idoines.
L’encombrement de ces éléments est dicté par l’écartement des tourillons et l’écartement des cales de frottement. C’est pourquoi il est opportun de diminuer l’angle de frottement au maximum tout en conservant une stabilité satisfaisante.
Dans mon cas, j’ai conservé un angle de 50° ce qui semble être un minimum à ne pas dépasser. L’écartement entre tourillon (largeur du barillet) est de 436 mm. La base annulaire fait 550 mm et 400 mm respectivement de diamètre externe et interne pour une épaisseur de 25 mm.
Ces 2 éléments sont eux aussi réalisés en sandwich carbone/balsa.

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